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La technique du SCV mise en place sur l'île comorienne d'Anjouan

Rédigé par Christiane Grimault Modifié le

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  • Formation aux paysans

Encore non utilisée par les paysans aux Comores, la technique du SCV est en passe d’être diffusée sur l’île d’Anjouan par l’ONG Dahari qui espère reproduire les résultats obtenus à Madagascar où la méthode est largement diffusée depuis 10 ans.

La parcelle agricole Mpagé est située dans un quartier du même nom à Mutsamudu, chef-lieu de l’île d’Anjouan et deuxième ville des Comores. Mise en place par l’ONG Dahari pour servir de lieu démonstration aux paysans,  elle s’étend sur une surface de 3,5 hectares, dont 2,5 hectares sont en inclinaison. Elle possède donc les caractéristiques idéales pour la démonstration des techniques agricoles adaptées aux reliefs en pentes, ces derniers représentants 80% des parcelles d’Anjouan.

Loin des modèles classiques, diverses techniques agro-écologiques sont ici mises en place pour les formations aux paysans : association et diversification des cultures, modèle d’aménagement en topo-séquence, méthodes de défense et de fixation des sols, intégration agriculture/élevage ou encore multiplication hors-sol. C’est sur cette parcelle qu’a été mise en place la première expérience de système de culture sous couverture végétale (appelée plus communément SCV) des Comores. 

SCV est une méthode de défense et de restauration du sol inspirée des observations des écosystèmes naturels. Elle consiste à maintenir une couverture végétale permanente sur le sol, afin de le protéger de l’érosion et de lui apporter la matière nécessaire à l’entretien de sa fertilité. Ces deux avantages ont un intérêt fort sur l’île comorienne d’Anjouan, marquée par d’importants problèmes d’érosion et de perte de fertilité dus aux mauvaises pratiques agricoles. Prenant appui sur la réussite malgache qui diffuse très largement cette technique depuis maintenant 10 ans, Dahari a mis en place tout un itinéraire technique qu’elle diffuse auprès des paysans par des formations qu’elle dispense sur sa parcelle.

L’ONG propose d’abord aux paysans la mise en place d’une jachère améliorée. Du stylosanthes, (de la famille des légumineuses), est plantée au début de la jachère. Au bout d’un à deux ans selon la dégradation du sol, elle est récupérée et redéposée dans les champs comme fertilisant. La jachère améliorée permet de réduire de plusieurs années le temps de repos de la terre. Il est ainsi ramené à 2 ans maximum, alors que sept à huit ans d’attentes ont à compter pour la jachère traditionnelle. La plantation peut alors reprendre, par une association de cultures.

Sur sa parcelle de Mpage, Dahari a mis en avant deux types de cultures. La première est l’association manioc+brachiaria. Le manioc tout d’abord est une culture très répandue aux Comores, car c’est un aliment consommé presque quotidiennement par la population. Cependant cette culture laisse habituellement les terres à nu. Pire, la récolte des tubercules laboure naturellement la terre et la rend meuble en surface, ce qui favorise le phénomène d’érosion. En l’associant au brachiaria, ce phénomène est stoppé. Cette espèce de la famille des graminées développe des racines qui fixent fortement les terres. Deux variétés, issues de Madagascar ont été introduites fin 2011 au sein de l’ONG et sont actuellement en cours de multiplication dans la parcelle de Mpage : Marandu et Humidicola. En plus de fixer les terres, le brachiaria sert de graminées aux animaux, la plupart des paysans étant aussi éleveurs.

La deuxième culture mise en place à Mpage est l’association maïs +niébé (ou voeme). Le maïs utilisé est une variété améliorée de cycle court du nom de Irat 200,qui permet de donner des rendements au bout de 3 mois. Les semences de cette variété sont proposées aux paysans qui souhaitent adopter la technique. Le niébé est utilisé pour couvrir le sol, son cycle de production est identique au maïs, et il peut donner jusqu’à 4 récoltes.

Pour assurer la pérennisation sur ces acquis auprès des paysans, Dahari a mis en place 4 phases de travail, dont les deux premières sont réalisées dans sa parcelle de démonstration. La phase démonstration vise à présenter la technique et ses avantages aux paysans. La phase formation consiste à la transmettre par une mise en pratique commune avec les techniciens et les paysans.  La troisième phase est celle de la maîtrise, elle est réalisée par les paysans eux-mêmes sur leurs propres parcelles, avec le suivi des techniciens. La dernière phase, celle de la diffusion, doit permettre aux paysans eux-mêmes de diffuser la technique,avec l’appui de Dahari.

Le processus est actuellement en phase de maîtrise. Les paysans qui participent au programme bénéficient des variétés améliorées en petite quantité pour effectuer les essais sur leurs parcelles. Pour assurer de bons rendements, Dahari leur diffuse des calendriers culturaux. L’ONG espère consolider les acquis de ses bénéficiaires en 2013 et pouvoir multiplier assez de semences pour répondre à la demande. La phase de diffusion sera lancée courant 2014.

A terme Dahari souhaite développer les activités de la parcelle de Mpage afin qu’elle devienne un centre reconnue pour la formation,la multiplication des semences et l’expertise agro écologique auprès des instances officielles et des projets agricoles. Elle devrait prochainement collaborer avec le Conseil Général de Mayotte pour assurer la multiplication de plantes endémiques des Comores dans le cadre d’un projet de reboisement.  

Pour en savoir plus sur l'ONG Dahari et le projet ECDD : http://www.ecddcomoros.org

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