Détecter la bactérie du dépérissement de l’oignon dans les semences

Rédigé par Isabelle Soustrade, Olivier Pruvost Modifié le

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  • Dépérissement bactérien de l'oignon (lésion sur feuilles et hampe florale)

La bactérie Xanthomonas axonopodis pv. allii (1) provoque chez les alliacées, comme l’oignon, des lésions sur les tissus aériens de la plante qui se met à dépérir. Les bulbes s’amoindrissent, ce qui entraîne des pertes de rendement de 10 à 50 %. La maladie a été observée pour la première fois en 1971 à la Barbade (Antilles), puis elle est apparue par vagues successives sur presque tous les continents. Elle a atteint l'île Maurice, puis l'île de la Réunion dans les années 80.

Les scientifiques du Cirad à la Réunion ont démontré que la bactérie pouvait être présente dans les semences d’oignon (2) et qu’une proportion de 4 graines infectées sur 10 000 était suffisante pour déclencher une épidémie (3). De plus, les semences issues de parcelles touchées par la maladie sont contaminées à des taux capables de générer de nouvelles épidémies (4). Pouvoir garantir la bonne qualité sanitaire des semences commerciales est donc indispensable. D'autant que l'échange de semences est l'agent principal de diffusion de cette maladie émergente.
Un test moléculaire de détection (multiplex nested PCR) de la bactérie dans les semences a donc été élaboré et finalisé en 2006. Capable de détecter toutes les souches et de façon plus fiable (seuil de 1 graine sur 30 000 avec une erreur de 0,01) que les méthodes classiques, il est désormais utilisable à la Réunion pour contrôler l’état sanitaire des semences importées et produites localement. Cette méthode sera prochainement proposée comme méthode de référence européenne auprès de l’Organisation Européenne de Protection des Plantes (OEPP), cette bactérie ayant été placée sur leur liste d’alerte en 2006.

Ce test peut également être utilisé pour confirmer un diagnostic sur broyat de feuilles présentant des symptômes. Un test multiplex PCR avait été précédemment mis au point pour le diagnostic sur suspension bactérienne après isolement.

La bactérie du dépérissement de l'oignon, histoire d'une émergence

La mise au point de ce test de diagnostic moléculaire n'a pu se faire sans une connaissance fine de la bactérie à détecter, Xanthomonas axonopodis pv. allii, et donc de longues années d'étude.

Découverte du pathovar Xanthomonas axonopodis pv. allii.
Les scientifiques ont d'abord cherché à expliquer l'apparition concomittante de cette bactérie sur plusieurs continents durant la décénnie 1970-80. S'agissait-il d'une seule et même espèce pathogène et , dans ce cas, quels sont les facteurs qui ont conduit à son émergence ? ou était-ce différentes espèces provoquant des symptômes identiques, comme dans le cas des pathogènes de la tomate du genre Xanthomonas. Pour le déterminer, une collection internationale de souches de la bactérie a été caractérisée. Tous les clones isolés sur les plants d'oignon se sont avérés appartenir à une seule espèce, Xanthomonas axonopodis, plus précisémment Xanthomonas axonopodis pv. allii. Cette bactérie est pathogène pour différentes alliacées - oignon, ail, poireau, ciboulette et échalotte.
Une étude de diversité génétique a montré que le polymorphisme des souches était variable selon leur origine géographique. Il existe des zones à forte diversité (Etats-Unis, Afrique du Sud) et des zones à faible diversité (Venezuela, Hawai, Barbade). Dans la région de l'océan Indien, au moins deux groupes semblent différenciés.

Comment la maladie se propage-t-elle ?
Une étude épidémiologique a ensuite démontré que la maladie pouvait se diffuser à large échelle, par les échanges commerciaux de semences et que 4 graines infectées sur 10000 suffisaient pour déclencher une épidémie. Des températures moyennes journalières supérieures à 20°C sont favorables au développement de la maladie. La dissémination de bactérie se fait par voie aérienne et est favorisée par la pluie, l'arrosage par asperseurs. Le vent peut propager les foyers jusqu'à 25 mètres.

Contacts :

isabelle.soustrade@cirad.fr, olivier.pruvost@cirad.fr
Umr Peuplements végétaux et bioagresseurs en milieu tropical (Pvbmt)

En savoir plus :

(1) Roumagnac, P., Gagnevin, L., Gardan, L., Sutra, L., Manceau, C., Dickstein, E. R., Jones, J. B., Rott, P., and Pruvost, O. 2004. Polyphasic characterization of xanthomonads isolated from onion, garlic and Welsh onion (Allium spp.) and their relatedness to different Xanthomonas species. Int. J. Syst. Evol. Microbiol. 54:15-24.
(2) Roumagnac, P., Gagnevin, L., and Pruvost, O. 2000. Detection of Xanthomonas sp., the causal agent of onion bacterial blight, in onion seeds using a newly developed semi-selective isolation medium. Eur. J. Plant Pathol. 106:867-877.
(3) Roumagnac, P., Pruvost, O., Chiroleu, F., and Hughes, G. 2004. Spatial and temporal analyses of bacterial blight of onion caused by Xanthomonas axonopodis pv. allii. Phytopathology 94:138-146.
(4) Humeau, L., Roumagnac, P., Picard, Y., Robène-Soustrade, I., Chiroleu, F., Gagnevin, L., and Pruvost, O. 2006. Quantitative and molecular epidemiology of bacterial blight of onion in seed production fields. Phytopathology 96:1345-1354.