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Vers un plan Ecophyto 2 ?

Rédigé par David Josserond l Shannti Dinnoo l Eric Jeuffrault Modifié le

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  • Caroline Gloanec presents the project biphyto to the Ecophyto parliamentary delegation
  • Député Dominique Potier au 3P © Cirad - Alexandre Reteau
  • Présentation du projet Biophyto

Le député de Meurthe-et-Moselle Dominique Potier a présenté son rapport d'évaluation et de révision du plan Ecophyto intitulé : « Pesticides et agro-écologie – Les champs du possible » [1]. Résultat de six mois de rencontres et visites sur le terrain, dont un passage à La Réunion, le rapport se veut volontaire et a pour objectif d’inspirer une nouvelle version du plan Ecophyto afin de réduire concrètement l’utilisation des produits phytosanitaires en France d’ici 2025.

Lancé en 2008 dans la cadre du Grenelle de l’Environnement[2], le plan Ecophyto vise  à réduire de moitié le recours aux pesticides dans l'agriculture d’ici 2018. Faisant notamment suite au rapport de l’Inserm relatif aux effets des pesticides sur la santé [3], le Premier ministre Manuel Valls a confié au député Potier une mission d’évaluation du plan Ecophyto, afin de proposer de nouvelles orientations.

Force est de constater qu’à mi-parcours du plan, les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes initiales.

Les outre-mer, « avant-garde de l’agroécologie tropicale »

Le rapport prend acte de nouvelles pratiques tant chez les producteurs que chez les consommateurs et propose 68 recommandations pour élaborer une version 2 du plan Ecophyto. Objectif affiché : donner un nouvel élan à la politique de maîtrise des produits phytosanitaires dans une dynamique agroécologique.

Deux recommandations concernent plus particulièrement le rôle–pilote des outre-mer, qui placent la France, selon le rapport, « à l’avant-garde en matière d’agroécologie en zone tropicale et insulaire ». Disposant d’une « longue tradition de coopération scientifique mettant en jeu partenaires et questions de recherche de la métropole et des outre-mer dans les différentes régions du monde », des établissements comme le Cirad pourraient utilement, de part leur expérience déjà acquise, contribuer à la mise au point de « méthodes innovantes, adaptables, évolutives » destinées à être diffusées.

Lors de leur visite en novembre dernier, le député Potier accompagné du directeur de la Direction Générale de l’Alimentation (DGAL), Patrick Dehaumont avaient fait le point sur le programme Réunion à l’éclairage des  différents acteurs locaux et pris connaissance sur le terrain des principaux projets en cours. Ainsi, lors de l’étape au Pôle de Protection des Plantes de Saint-Pierre, nos équipes ont pu interroger les députés Dominique Potier et Jean-Jacques Vlody sur le rôle-clé que La Réunion pourrait jouer dans l’émergence et l’appropriation de techniques innovantes en matière d’agroécologie.

S’affranchir des contraintes phytosanitaires en zone tropicale

La mission recommande d’accorder une priorité aux outre-mer dans la « mise en œuvre d’un plan de résorption des impasses phytosanitaires ». Les producteurs de cultures spécialisées, en particulier fruits et légumes, manquent souvent de solutions techniques homologuées pour protéger leurs cultures des principaux bioagresseurs. Ces contraintes phytosanitaires mettent ainsi en péril de nombreuses productions et filières, et constitue sans nul doute un frein à leur développement économique, notamment dans les outre-mer français. Le rapport préconise donc, entre autres, « la mise en place d’une procédure simplifiée pour l’homologation rapide des méthodes alternatives » à la lutte chimique, sécurisée et adaptée au contexte ultramarin.

En outre, la mission juge trop long le délai réglementaire actuel d’obtention de mise sur le marché de produits de biocontrôle [4], pénalisant bien souvent là aussi la mise en pratique des modèles et des procédés innovants, sachant qu’en milieu tropical, il vaut « mieux prévenir pour moins intervenir ». À ce titre, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail ( Anses) doit être un accélérateur du progrès et « faciliter les possibilités de tester, valider et promouvoir les solutions émergentes de lutte biologique » en priorisant les dossiers de biocontrôle. D’autant qu’à la Réunion, nous disposons déjà d’outils locaux de production pour les développer au plan commercial,  à l’exemple de la Coccinelle et de Betel Réunion.

Ces problématiques de biocontrôle devraient rapidement faire l’objet d’un plan plus global et concerté, mobilisant de façon mieux coordonnée les organismes de R&D concernés, et dont « la maîtrise d’œuvre pourrait être confiée conjointement au Cirad et à l’ Inra, en lien étroit avec l’Anses[5] et les acteurs concernés (firmes, filières et territoires, acteurs européens)».

Renforcer la dynamique des réseaux inter-DOM, européens et internationaux

Le rapport considère également que la « diffusion des innovations techniques et d’appropriation des résultats de la recherche appliquée par les agriculteurs » constitue aujourd’hui un enjeu majeur pour les outre-mer. En retour, il semble essentiel que la recherche puisse intégrer les questionnements et les urgences des producteurs. C’est pourquoi, la mission propose d’appuyer les Réseaux d’Innovation et de Transfert Agricole (RITA) « dans leur rôle d’interface entre la recherche et les professionnels », dont l’animation nationale scientifique et technique a été confiée à l’ACTA et au Cirad, en veillant « à la participation proactive des différents porteurs d’enjeux, en particulier là où l’organisation des producteurs est fragile ».

De plus, la mission recommande de renforcer la dynamique de ces réseaux en développant des dispositifs d’échanges inter-DOM autour de thématiques communes, en participant aux réseaux thématiques européens dans le cadre du partenariat européen pour l’innovation, et enfin en contribuant aux échanges avec les producteurs des pays voisins dans le cadre de la coopération internationale de proximité.


[1] Découvrez le rapport « Pesticides et agro-écologie – Les champs du possible » et sa synthèse : www.dominiquepotier.com.
[2] Lancé en juillet 2007, le « Grenelle Environnement » a réuni les représentants de l’État français et de la société civile pour prendre des mesures à long terme en faveur de l’environnement et du développement durable. Le rapport issu des travaux préparatoires a ainsi servi de base à la mise en place d’une stratégie nationale de développement durable fondée sur un triple objectif : lutte contre le réchauffement climatique, préservation de la biodiversité et réduction des pollutions.
[3] Le texte intégral du rapport est disponible sur le site de l’Inserm : www.inserm.fr.
[4] Selon l’article L.253-6 du code rural, les produits de biocontrôle sont des agents et produits utilisant des mécanismes naturels dans le cadre de la lutte intégrée contre les ennemis des cultures et en particulier: macro-organismes ou produits phytopharmaceutiques comprenant des micro-organismes, des médiateurs chimiques comme les phéromones et les kairomones et des substances naturelles d'origine végétale, animale ou minérale. 
[5] L’Anses sera en charge de la délivrance des Autorisations de Mise sur le Marché (AMM) à compter de juillet 2015.

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